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Photo du rédacteurLe Lab' Électoral

Charlie Hebdo — Les politiques se transformeraient-ils en influenceurs ?

Vidéos sur TikTok et Instagram ou interviews politico-intimes sur la chaîne d’un youtubeur people... Aucun doute, les élus adoptent tous les modes de communication. Et ce n'est pas nouveau. À l'heure de l'instantanéité et de la recherche du buzz, l'utilisation des réseaux sociaux tend à décomplexifier le discours et le rôle du politique.


La semaine dernière, la députée de La France insoumise Manon Aubry se mettait en scène pour remplir sa déclaration de patrimoine. La vidéo, publiée sur son compte TikTok, est visionnée près de 200 000 fois. Attablée devant son ordinateur, elle s’interroge – en s’adressant à la caméra – sur la différence de son patrimoine avec d’autres députés, « je me dis qu’il y a des gens qui sont élus et qui ne viennent pas du même monde que moi. » Elle pointe notamment du doigt la catégorie « immeubles bâtis et non bâtis », moquant le fait qu’elle posséderait « un immense immeuble ». Une indignation un peu facile… et pas très conforme à la réalité. « On voit surtout dans cette vidéo le manque de connaissances juridiques de la députée européenne » estime Paul Brounais, fondateur de l’agence Deux Quatre, spécialisée dans la communication publique et politique. « Le fait que personne dans son équipe n’ait relevé qu’un bien immobilier en droit correspond à tout type de bâtiment et pas à un immeuble en tant que tel est grave. Soit c’est une erreur commise en connaissance de cause et elle prend ses électeurs pour des débiles, soit elle n’est vraiment pas au courant et c’est quand même inquiétant pour une élue. »


Sortir du lot


Ce n’est pas nouveau : pour rester moderne, la communication politique doit s’adapter aux modes de diffusion actuels. Et désormais, les réseaux sociaux ont tendance à prendre le dessus. Paul Brounais rappelle l’intérêt pour un élu d’être présent sur ces réseaux sociaux, « quand TikTok, Instagram et Twitter sont apparus, ils sont devenus un nouveau territoire de conquête pour les politiques. Et qui dit territoire, dit électorat. L’enjeu pour eux est d’aller chercher des audiences complémentaires, de marquer les esprits mais aussi de se différencier en termes de communication. » La stratégie est donc simple : le politique se doit d’être sur les réseaux sociaux.


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Le politique « people »


Pas étonnant donc, de retrouver la députée LFI sur le canapé du youtubeur people Sam Zirah pour un entretien d’une heure et dix minutes. Une vidéo qui cumule à ce jour plus de 30 000 vues. Son collègue Sébastien Delogu (LFI) s’est lui aussi installé sur ce même canapé la semaine précédente. L’interview a été regardée près de 54 000 fois. De même que l’on a vu et revu Jordan Bardella, le président du Rassemblement National, très présent sur TikTok lors de la dernière campagne législative. Paul Brounais, spécialisé en communication publique et politique estime qu’avec les réseaux sociaux, « certains politiques jouent sur une forme de populisme, surtout à l’extrême gauche et à l’extrême droite de l’échiquier politique. »


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Le 1er janvier 2012 déjà, Jean-Luc Mélenchon lançait sa propre chaîne YouTube. Au lieu de simplement utiliser les réseaux sociaux comme un support, il s’en sert comme un véritable outil de communication. « Sur YouTube, les gens sont friands des longs formats, les politiques peuvent ainsi prendre le temps de parler d’un sujet et d’interagir avec leur communauté » remarque le spécialiste de la communication publique et politique Paul Brounais. Encore plus malin, en créant sa chaîne YouTube, Jean-Luc Mélenchon crée son propre média. Une façon pour lui de « contrôler ce qu’il dit et de ne pas être censuré » renchérit Paul Brounais. Au risque de dire des choses absurdes en toute impunité – comme dans la fameuse vidéo TikTok de Manon Aubry – et de rendre normal un discours politique peu élaboré.


La dégradation du politique


Et si, pour devenir politique, il suffisait d’un franc-parler, d’une tenue qui fasse sérieux et d’un téléphone ? Quand Emmanuel Macron arrive au pouvoir en 2017, il ouvre les portes du gouvernement… à des gens qui n’ont jamais fait de politique. Un pari pour le moins risqué.


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Même constat pour Paul Brounais, la politique a bel et bien perdu toute sa noblesse. « Quand on voit le style de Michel Barnier lors de son discours de politique générale et tous les élus qui s’exclament en arrière-fond, c’est quand même assez dingue. Il n’y a plus le respect et la stature politique d’avant. »


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