
Lorsqu’arrivent les élections municipales, nos villes et villages se couvrent d’affiches électorales. C’est un rituel familier : à proximité des bureaux de vote, des panneaux métalliques accueillent les visages souriants ou déterminés des candidats, accompagnés de leurs slogans et de quelques phrases-clés qui résument un programme ou un projet d’avenir pour la commune. Toutefois, loin d’être de simples supports de propagande, ces affiches sont régies par une réglementation stricte. Zoom sur les règles du jeu pour éviter tout faux-pas et profiter pleinement de ce levier de communication.
L’affiche électorale, bien plus qu’un simple papier
L’affiche électorale est un outil de propagande officiel, encadré par le Code électoral. Elle doit répondre à des critères précis sous peine d’être rejetée par la préfecture et de faire perdre au candidat un atout majeur pour faire connaître son programme.
Quelques règles incontournables :
Interdiction de l’emblème national ou de la juxtaposition du bleu, du blanc et du rouge évoquant directement le drapeau français.
Format : 59,4 cm x 84,1 cm (594 X 841mm)
Dans de nombreuses communes, l’affiche reste un puissant marqueur visuel de la campagne. Les habitants la voient au quotidien, elle donne un visage (ou une équipe) au bulletin de vote. Pour être éligibles au remboursement par l’État, les candidats doivent naturellement suivre scrupuleusement ces prescriptions légales.
Des coûts pris en charge sous conditions
Les dépenses liées à l’impression et à l’affichage des affiches électorales peuvent être remboursées, mais pas pour tout le monde. Dans les communes de plus de 1 000 habitants, seuls les candidats ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés y ont droit.
Les détails du remboursement :
L’État prend en charge le coût du papier et de l’impression pour deux affiches A1 identiques par emplacement.
Deux affiches supplémentaires (dénommées affichettes) au format A3 peuvent également être financées, pour annoncer notamment des réunions électorales.
Contrairement à d’autres supports (bulletins de vote, circulaires…), la loi ne fixe pas d’exigence particulière concernant le grammage ou la qualité du papier pour les affiches. Dans les communes de plus de 2 500 habitants, il est toutefois indispensable de soumettre ces affiches à la commission de propagande afin qu’elles soient validées et donc finançables.
Et la subrogation ?
Cette procédure permet aux candidats de ne pas payer immédiatement leur imprimeur. Si le candidat dépasse la barre fatidique des 5 % au soir du scrutin, c’est la préfecture qui réglera la note. Dans le cas contraire, le candidat doit assumer lui-même les frais d’impression.
Des panneaux spécifiques, un cadre réglementé
Le Code électoral, à son article L.51, prévoit que toutes les communes installent des panneaux métalliques destinés à accueillir les affiches électorales pendant la période de campagne. Chaque candidat bénéficie d’une surface identique, de quoi coller une grande affiche et une plus petite sur le même panneau.
Comment obtient-on un panneau ?
La demande est à adresser à la mairie au plus tard le mercredi précédant chaque tour de l’élection.
Dans les communes de moins de 1 000 habitants, l’attribution se fait par ordre de dépôt des candidatures.
Pour les autres communes, un tirage au sort est organisé pour déterminer l’emplacement de chaque candidat.
L’ordre obtenu demeure identique pour le second tour. Même un candidat qui se retire peut conserver son panneau, pour y afficher par exemple des remerciements ou un message expliquant son désistement.
L’interdiction de l’affichage sauvage : des règles et des sanctions renforcées
D’une manière générale, la loi prohibe le recours à l’affichage sauvage. Le troisième alinéa de l’article L.51 du Code électoral précise en outre que :
« Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d’une élection et jusqu’à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, tout affichage relatif à l’élection, même par affiches timbrées, est interdit en dehors de cet emplacement ou sur l’emplacement réservé aux autres candidats, ainsi qu’en dehors des panneaux d’affichage d’expression libre lorsqu’il en existe. »
En cas de non-respect, l’article L.90 du Code électoral prévoit une amende pouvant aller jusqu’à 9 000 euros pour le candidat contrevenant.
Les moyens d’action du maire et du préfet
Le décret n° 2020-1397 du 17 novembre 2020 a créé l’article R.28-1 du Code électoral, qui détaille les modalités de dépose d’office des affiches par le maire, après mise en demeure du candidat. Si le maire n’agit pas, le préfet peut se substituer à lui pour mettre fin à l’affichage illicite.
Un encadrement supplémentaire par le Code de l’environnement
L’article L. 581-3 du Code de l’environnement définit la publicité comme « toute inscription, forme ou image, destinée à informer le public ou à attirer son attention ». Les affiches de propagande à caractère politique entrent dans ce champ. L’article L. 581-15 prévoit que « la publicité sur les véhicules terrestres, sur l’eau ou dans les airs peut être réglementée, subordonnée à autorisation ou interdite, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ».
En cas de publicité irrégulière, l’article L.581-27 permet à l’autorité compétente de prendre un arrêté ordonnant dans les cinq jours soit la suppression, soit la mise en conformité de la publicité concernée. Le juge apprécie au cas par cas si le véhicule (camion, bus, etc.) est utilisé principalement à des fins de déplacement ou s’il sert essentiellement de support publicitaire (stationnement prolongé ou circulation à vitesse réduite, par exemple).
Les panneaux supplémentaires : une question de jauge électorale
Si la loi impose des panneaux à proximité immédiate des bureaux de vote, elle offre également la possibilité à la commune d’en installer d’autres aux endroits qu’elle juge pertinents, selon des seuils définis à l’article R.28 du Code électoral. Ces seuils dépendent du nombre d’électeurs inscrits.
Moins de 500 électeurs : jusqu’à 5 emplacements en plus.
501 à 5 000 électeurs : jusqu’à 10 emplacements en plus.
Plus de 5 000 électeurs : on part de 10 emplacements, auxquels on ajoute un emplacement supplémentaire toutes les 3 000 personnes inscrites. S’il reste plus de 2 000 électeurs non comptabilisés dans la division, on ajoute encore un emplacement.
Exemples :
Une commune de 7 000 électeurs : 10 emplacements de base + 2 supplémentaires (car 7 000 / 3 000 = 2, reste 1 000) = 12 au total.
Une commune de 11 500 électeurs : 10 de base + 3 supplémentaires (11 500 / 3 000 = 3, reste 2 500) = 13… mais 2 500 > 2 000, donc on ajoute 1 emplacement de plus, soit 14 au total.
Concevoir une affiche électorale percutante
Pour tout candidat, l’affiche électorale constitue une vitrine essentielle. Elle capte l’œil et doit évoquer instantanément l’identité de la liste et ses idées-forces. Le choix de la photographie est donc stratégique : se montrer seul ou entouré de son équipe, faire poser tout le monde dans un décor naturel ou devant un bâtiment emblématique… Rien n’est laissé au hasard.
D’autres éléments indispensables :
Le nom du candidat, éventuellement son appartenance politique.
Un slogan concis et percutant, véritable colonne vertébrale du programme.
Bien pensée, l’affiche électorale peut donner de l’ampleur à une campagne et consolider l’image que l’on souhaite renvoyer aux habitants de la commune. Respecter la législation, soigner son visuel, fédérer les colistiers autour d’un message clair : autant de clés pour marquer durablement les esprits à l’approche du scrutin.
Des modes de communication alternatifs à l’affichage
En plus des affiches, de nombreux autres canaux de campagne demeurent accessibles jusqu’à la veille du scrutin : distribution de tracts, presse, radio, télévision, utilisation d’Internet (réseaux sociaux, site web), réunions publiques… Autant d’opportunités pour les candidats de faire connaître leur programme et de convaincre les électeurs, dans le strict respect de la réglementation.
En résumé
Règles strictes : format A1, interdiction de représenter le drapeau français (hors logo de parti politique).
Remboursement sous conditions : 5 % des voix dans les communes de plus de 1 000 habitants.
Commission de propagande dans les communes de plus de 2 500 habitants pour valider l’éligibilité des affiches.
Panneaux d’affichage : un emplacement égal pour tous, demande à effectuer en amont auprès de la mairie.
Affichage sauvage prohibé :
Interdiction formelle (L.51) six mois avant l’élection et jusqu’au scrutin, en dehors des espaces dédiés.
Amende possible de 9 000 euros (L.90) pour le candidat.
Procédure de dépose d’office par le maire ou substitution du préfet (R.28-1).
Code de l’environnement : l’affichage politique est considéré comme de la publicité, donc soumis aux règles et sanctions prévues par la loi.
Panneaux supplémentaires : leur nombre dépend du volume d’électeurs inscrits.
Stratégie visuelle : un slogan fort, une photo soignée, un message clair.
Autres modes de campagne : tracts, médias traditionnels, Internet, réunions publiques…
Pour qui sait jouer de cette vitrine et des règles en vigueur, l’affiche électorale demeure un outil précieux au service d’une campagne municipale ambitieuse. Elle est la porte d’entrée visuelle, celle que croisent tous les habitants, et parfois leur premier contact avec un programme politique. Autant ne pas négliger son impact !